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Commission européenne, QandA sur l'application des arrêts Kolin et Qingdao
Commentaire par François Lichère, professeur agrégé de droit public
La Commission européenne publie un « Questions and Answers » sur la participation au marché public des soumissionnaires de pays tiers non couverts au regard de la jurisprudence récente de la cour de justice - CJUE 22 Octobre 2025 C-652/22, Kolin et 13 Mars 2025, C-266/22, Qingdao sur l’application des arrêts KOLIN (C-652/22,) et QINGDAO (C-266/22).
- Sommaire de L'Essentiel du Droit des Contrats Publics - Mai 2025
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Commentaires de textes ou décisions
► CE, 17 avril 2025, n° 501427, Société Consortium Stade de France, classé B
Il n’y a pas de conflits d’intérêts lorsqu’une autorité concédante fixe comme critère de choix la solidité des engagements des candidats pris auprès de tiers.
► CJUE, 29 avril 2025, C‑452/23, Fastned Deutschland GmbH & Co. KG
Les règles relatives à la modification des concessions s’appliquent même si le concessionnaire n’a plus la qualité d’entité in house et sans que le requérant puisse contester l’attribution directe initiale ; les notions de travaux ou services devenus nécessaires et de nature globale sont d’interprétation stricte.
► CE, 12 mai 2025, n°492917, SNCF Réseau, et n°494301, INRAE, classés C
Il n’est pas possible de modifier des concessions par voie législative sans respecter les règles de modifications prévues par la directive concessions.
► Commission européenne, QandA sur l'application des arrêts Kolin et Qingdao
La Commission européenne publie un « QandA » sur la participation au marché public des soumissionnaires de pays tiers non couverts au regard de la jurisprudence récente de la cour de justice - CJUE 22 Octobre 2025 C-652/22, Kolin et 13 Mars 2025, C-266/22, Qingdao sur l’application des arrêts KOLIN (C-652/22,) et QINGDAO (C-266/22).
Brèves
Texte commenté :
Commission européenne, QandA sur l'application des arrêts Kolin et Qingdao
► Consulter le QandA.Commentaire du texte :
Une fois n’est pas coutume, c’est un QandA ("Questions and Answers"), publiée en anglais, qui fait l’objet d’un commentaire, l’occasion de revenir sur ces deux arrêts qui présentent une certaine importance s’agissant d’opérateurs non couverts par un accord international relatif à l’accès aux marchés publics.
Un des premiers apports de ce QandA est justement d’apporter des éléments sur les pays non couverts par un accord, c’est-à-dire ceux qui sont hors AMP, espace économique européen ou accord bilatéral comportant des règles sur les marchés publics (CETA entre l’UE et le Canada par exemple). Il existe un site dédié (https://webgate.ec.europa.eu/procurementbuyers/#/procumementlocation), mais comme un éventuel défaut ne décharge pas une autorité contractante de sa responsabilité dit le QandA, il convient de se reporter, pour l’AMP à https://www.wto.org/english/tratop_e/gproc_e/gp_app_agree_e.htm et pour les accords internationaux contenant des dispositions sur les marchés publics à https://policy.trade.ec.europa.eu/eu-trade-relationships-country-and-region/negotiations-and-agreements_en.
Par ailleurs, le QandA précise plusieurs points :
- Les pouvoirs adjudicateurs/entités adjudicatrices ne sont pas tenus d'évaluer si l'accès au marché public du pays tiers a été accordé de manière réciproque et équitable (pour le cas où il existe un accord)
- L'arrêt Kolin ne se prononce pas sur l'accès des biens (ou services) originaires de pays non couverts et non régis par les engagements internationaux de l'Union
- Les principes de l'arrêt Kolin s'appliquent à toute procédure de passation de marchés publics, indépendamment des seuils de l'UE et de la valeur de l'offre
- L’arrêt Kolin ne dit rien des groupements d’entreprises ou des sous-traitants, mais il appartient à chaque pouvoir adjudicateur / entité adjudicatrice de décider au cas par cas d'admettre ou non la participation d'opérateurs économiques de pays non couverts à une procédure de passation de marché spécifique, soit en leur propre nom, soit en tant que membres de consortiums ou en tant que sous-traitants.
- L’article 9 de la directive 2014/24 sur les Marchés publics passés et concours organisés en vertu de règles internationales n’est pas affecté par l’arrêt Kolin
- Des dispositions nationales prises sur cette question sont illégales, car adoptées en violation de la compétence exclusive de l'UE (arrêt Qingdao). En conséquence, il appartient au pouvoir adjudicateur de décider d'accepter ou d'exclure les opérateurs économiques des pays non couverts en écartant des dispositions nationales qui fixeraient un cadre. Il peut le faire au cas par cas (à l’avance ou pendant la procédure) ou en adoptant une approche uniforme non contraignante (y compris en visant à exclure systématiquement les tiers non couverts ou au contraire à les traiter sur un pied d’égalité avec les concurrents européens ou encore en adaptant le résultat résultant de la comparaison entre les offres soumises par ces opérateurs et celles soumises par d'autres opérateurs)
- En revanche, les voies de recours dont disposent les opérateurs de pays tiers non couverts relèvent exclusivement du droit national, sans qu’il existe un droit au recours garanti par le droit européen pour ces tiers non couverts. Et il appartient aux autorités nationales compétentes d'identifier d'autres dispositions nationales (qui ne transposent pas le droit de l'Union en matière de marchés publics) sur lesquelles ces opérateurs économiques peuvent se fonder.
En attendant donc que la réforme des directives se saisisse, éventuellement, de cette question, il appartient à chaque autorité contractante de déterminer le régime applicable à des cocontractants issus de pays tiers « non couverts ». Si les autorités contractantes françaises sont peut-être moins concernées que celles des pays de l’Est européen, il peut néanmoins arriver qu’elles aient affaire à, par exemple, des entreprises turques ou chinoises et il convient de réfléchir à la manière dont ces offres vont être traitées.
François LICHERE
Professeur agrégé en droit public